Le terme shogun (ou Seii taishōgun) désigne le général des daimyo (chef de guerre) du Japon féodal. C'est un titre militaire de premier plan attribué à ceux qui étaient chargés de combattre les « Emishi » : des tribus indigènes hostiles. Cependant, avec le temps, le rôle du shogun a dépassé les limites militaires pour se muer en un pouvoir politique de grande importance.
Ces chefs de guerres s'entourent de vassaux assurant leur protection dans leurs châteaux. La loyauté d'un vassal est accordé en échange de l‘appartenance au fief et différents clans des seigneurs. Les shoguns règnent pendant sept siècles jusqu'à la restauration de l’ère Meiji de 1868.
Nous verrons donc dans cet article toute l'histoire et les spécificités des shogun et nous verrons notamment :
- Comment devenir Shogun ?
- Qui était le le premier Shogun ?
- Comment était organisé le gouvernement du Shogunat ?
- Défis et déclins des Shogun japonais
- Le shogunat Tokugawa
- La politique d'isolation du Japon
Comment devenir Shogun ?
Au Japon féodal, le titre de shogun était l'un des plus prestigieux et des plus convoités. Cependant, accéder à cette position n'était pas une tâche aisée. L'ascension au rang de shogun nécessitait une combinaison de facteurs, y compris la naissance, l'habileté militaire, le soutien politique, et bien souvent, un peu de chance.
Naissance et Hérédité
Le titre de shogun était souvent hérité. Cela signifie qu'il était généralement transmis de père en fils au sein d'un clan puissant. Si vous étiez né au sein du clan Tokugawa pendant la période Edo, par exemple, vous auriez pu être en ligne pour devenir shogun. Cependant, la naissance seule ne garantissait pas le poste. Les conflits de succession étaient fréquents et pouvaient souvent conduire à des luttes de pouvoir et même à des guerres civiles.
Habileté Militaire
Au-delà de la naissance, le futur shogun devait prouver sa valeur sur le champ de bataille. La capacité à diriger efficacement en temps de guerre était essentielle. Les shoguns étaient des chefs militaires et leur pouvoir était souvent lié à leur capacité à gagner des batailles et à contrôler les samouraïs. Minamoto no Yoritomo, par exemple, a été nommé shogun après avoir vaincu ses rivaux dans la guerre de Genpei.
Soutien Politique
Même avec l'héritage et l'habileté militaire, un shogun potentiel avait encore besoin du soutien politique. Cela impliquait généralement de gagner la faveur de l'empereur et de la cour impériale. Cependant, l'équilibre du pouvoir entre la cour impériale et le shogunat fluctuait souvent. Parfois, le shogunat avait plus de pouvoir réel que l'empereur lui-même.
Qui était le premier Shogun ?
La guerre des Genpei (1180-1185 de notre ère) vit la victoire du clan Minamoto sur les Taira. Après la capitulation des Taira, Minamoto no Yoritomo devint ainsi le plus puissant chef militaire au Japon. Yoritomo s’auto-proclama le premier shogun. En soit le premier grand dictateur militaire du Japon. Poste qu'il occupera de 1192 à 1199 de notre ère. Il fut le premier shogun du Shogunat Kamakura.
La position du shogun fut la première à offrir un système de gouvernement militaire et social alternatif à celui de la cour impériale japonaise. Le titre de shogun ou " protecteur " avait été utilisé auparavant (seii tai shogun) mais n'avait été qu'un titre temporaire. Ce titre était donné aux commandants militaires en campagne contre la rébellion d’Ezo/Emishi (Ainu) dans le territoire encore controversé du nord duƒh1 Japon au VIIIe siècle de notre ère.
Le titre de shogun fut ensuite reutilisé par le cousin de Yoritomo, Minamoto Yoshinaka (1154-1184 de notre ère), qui commanda les forces du clan à Heiankyo en 1183. Bien qu'il ne l'ait pas reçu de l'empereur, comme le veut la tradition dans la culture japonaise.
Yoritomo a pu porter le titre de shogun avec une nouvelle signification plus large grâce à son accord avec le jeune empereur Go-Toba (1183-1198) qui l'a accordé en échange de la protection militaire de Yoritomo. Techniquement, l'empereur était au-dessus du shogun, mais dans la pratique, c'était l'inverse puisque celui qui contrôlait l'armée contrôlait aussi l'Etat.
Les empereurs conservaient une fonction cérémonielle, et les shoguns cherchaient à obtenir leur aval pour donner un soupçon de légitimité à leur propre règle. En effet, le fait que l'empereur ait donné le titre conférait au shogun son statut de " protecteur de la nation « .
Les empereurs pouvaient retarder la nomination d'un shogun, mais pas indéfiniment. À ce stade de l'histoire nippone n'était pas aussi prestigieux qu'il ne l'était au XIIIe siècle de notre ère.
Yoritomo fut remplacé comme shogun par son fils aîné Minamoto no Yorie (r. 1202-1203 CE), mais seulement après une lutte de pouvoir. A la mort de Yoritomo, son épouse, Hojo Masako (1157-1225), et son père, Hojo Tokimasa, avaient décidé de gouverner eux-mêmes. C’est à ce moment que le premier poste de régent shogun (shikken) fut crée.
Dans cet arrangement, très copié tout au long de la période Kamakura (1185-1333), le shogun régent disposait du vrai pouvoir et le shogun était une simple marionnette. Cela permettait également à un régent de contourner l'exigence selon laquelle un shogun devait provenir de la la noble caste et classe des guerriers ! Sans cela il était impossible à une femme ou une personne n’étant pas un samouraï d’atteindre cette position de pouvoir.
L'absence de toute retranscription écrite concernant le rôle précis du shogun et l'absence de tous documents légaux signifie que ce rôle a été totalement manipulé par une longue lignée de régents. On en compte 16 de 1203 à 1333. Ce n'était pas le shogun qui gouvernait directement le Japon mais le nouveau gouvernement shogunat. Cette situation ne changera pas jusqu'à l'établissement du shogunat Ashikaga en 1338 de notre ère.
Comment est organisé le shogunat ?
Le shogunat, ou bakufu signifie " gouvernement de tente " en référence à ses origines en tant que titre détenu par un commandant sur le champ de bataille. Ce titre de chef suprême se base sur la relation féodale entre les seigneurs et leurs vassaux. Cette structure de gouvernance militaire a régi le Japon pendant une grande partie de son histoire féodale.
Le rôle du Shogun
Le shogun était le dirigeant suprême du shogunat. Il détenait le pouvoir exécutif et avait le dernier mot sur les décisions politiques et militaires. Cependant, le rôle du shogun n'était pas uniquement militaire. Il était aussi le lien entre le bakufu et la cour impériale japonaise, qui, bien que dépourvue de véritable pouvoir, conservait une grande importance symbolique.
Kanrei: le second du Shogun
Le Kanrei est un poste clé dans le shogunat, en particulier pendant l'époque de Muromachi (1336 à 1573). Le Kanrei est le second du shogun. Il supervise l'administration du shogunat. C'est un rôle donné à un membre de la noblesse de l'une des trois familles, les Shiba, les Hosokawa et les Hatakeyama. C’est une fonction clé pour d'assurer la liaison entre le shogun et les gouverneurs militaires régionaux et leurs adjoints.
Samurai-dokor
Dès 1180, le Samurai-dokor (Conseil des serviteurs) fut formé. Il supervise les guerriers vassaux (gokénine) et impose des mesures disciplinaires en cas de délits mineurs. Ensuite, il supervisera également les agents du gouvernement dans les provinces, la propriété du shogunat. La cour impériale de la capitale était supervisée par le shugo de Kyoto ou gouverneur militaire.
Les Daimyo
Juste en dessous du shogun se trouve les daimyo, les seigneurs féodaux qui dirigent des domaines particuliers au nom du shogun. Les daimyo étaient des alliés clés pour le shogun, fournissant des troupes en temps de guerre et administraient leur territoire en temps de paix. Cependant, les relations entre le shogun et les daimyo étaient souvent tendues, avec des luttes de pouvoir et des rébellions occasionnelles.
Les Samurai
Les samouraïs sont la classe guerrière du Japon féodal et constitue l'épine dorsale du shogunat. Ils servent comme soldats en temps de guerre et comme fonctionnaires en temps de paix. Ils devaient loyauté et service à leur daimyo, et par extension au shogun.
Les Rōjū et les Wakadoshiyori
Au sein du bakufu, il existe également des postes administratifs importants. Les rōjū étaient des conseillers de haut rang qui aidaient le shogun dans la prise de décisions politiques. Les wakadoshiyori étaient des superviseurs des affaires des hatamoto et des gokenin, les vassaux directs du shogun.
Les Jito et les Shugo
Sous les Kamakura et Muromachi bakufu, les jito étaient des intendants qui géraient des propriétés spécifiques pour le shogun. Les shugo étaient des gouverneurs militaires qui maintenaient l'ordre dans des provinces spécifiques.
Déclin et défit des Shogun Japonais
Le post de shogun n’était pas de tout repos. Les shoguns durent faire face aux famines, des invasions barbares et de bandits. Parfois contestés, ils durent faire face á des invasions et à des tentatives de coup d’État. Comme notamment celle de l'empereur Go-Toba en 1221 après J.-C.
Défis des chefs de guerres japonais
On appelle aussi ce grand fait d’histoire : la perturbation Jokyu ! Qui se termina par l'exil de l’empereur japonais dans un nouveau palais imperial. Le shogun fit aussi face à la tentative de Restauration de Kemmu (1333-1336) de l'empereur Go-Daigo (1318-1339) qui remplaça le shogunat par un autre.
Le pouvoir du shogunat devait aussi faire face aux menaces occidentales et barbares. Le leader mongol Kublai Khan (1260-1294) décida d'envahir le Japon en 1274 et 1281, mais par deux fois la résistance japonaise et les tempêtes du typhon mirent l’ennemi en déroute, les légendes japonaises racontent que ce sont les kami (dieux japonaise) qui ont protégé l’île…
Le prochain grand défi pour l'autorité du shogunat fut de nouveau interne. La guerre d'Onin (1467-1477 après J.-C.) fut une guerre civile entre seigneurs de guerre rivaux et elle a causé beaucoup de morts et de destructions, surtout à Heiankyo. S'ensuivit un siècle d'âpres combats et de troubles, la période dite Sengoku ou période des États belligérants (1467-1568 de notre ère).
Oda Nobunaga: l'unificateur du Japon
Cette tourmente a finalement pris fin avec la montée du seigneur de guerre Oda Nobunaga (1534-1582). Il avait progressivement étendu son territoire à travers les années 1550/60 à partir de sa base du château de Nagoya, en battant tous ses adversaires. Il s'empara finalement de Heiankyo en 1568 et exila le dernier shogun Ashikaga Yoshiaki, en 1573.
La prise de pouvoir de Nobunaga annonça la période Azuchi-Momoyama (1568/73-1600) et ses deux successeurs immédiats, également de puissants seigneurs de guerre. Ils mirent également les shoguns à l'arrière-plan de la politique japonaise. Ces successeurs furent Toyotomi Hideyoshi (1582-1598) et Tokugawa Ieyasu (1603-1605). Ce trio est considéré comme les "grands unificateurs" du Japon.
L'histoire du Shogunat Tokugawa
Avec Ieyasu aux commandes, la paix s'installa finalement au Japon, et une nouvelle société basée sur l'éthique des samouraïs d'obéissance et de loyauté fut établie. Ils suivirent à la lettre le bushido (la voie du guerrier). À cette période, chaque samuraï était armé de:
- son sabre katana,
- d'une armure en metal aux couleurs de son clan
- et de son masque japonais type mempo pour terrifier ses ennemis. Le masque samouraï pouvait représenter un démon oni ou encore un terrifiant fantôme. Ce valeureux guerrier japonais avait pour seul mission de protéger son chef de guerre.
En 1600, William Adams devient le premier Anglais à mettre les pieds au Japon. Impressionné par les navires de commerce européens, Ieyasu demande à Adams de l'aider à construire sa propre flotte. Conscient que les Anglais n'ont aucun intérêt à convertir les Japonais au christianisme, Ieyasu décide d'expulser les Portugais et les Espagnols qui combinent souvent travail missionnaire et commerce.
En tant que Shogun, Tokugawa Ieyasu a dirigé d’une main de fer ses seigneurs de guerre daimyo pour éviter toute rébellion. Lorsqu'il meurt à 72 ans, sa vision d'un système de classes, basé sur le règne des samouraïs, est une réalité. Son petit-fils, Iemitsu, régnera plus durement. N'ayant pas de guerre à mener, Iemitsu resserre le contrôle sur le pouvoir des daimyos et de leurs armées de samouraïs téméraires.
Même si les missionnaires étrangers sont expulsés du Japon, Iemitsu craint toujours l'influence du christianisme. Les paysans appauvris et les chrétiens persécutés explosent de colère. La rébellion de Shimabara en 1637 entraîne la mort de milliers de personnes. Afin d'éviter de nouvelles dissensions dues à l'influence étrangère, Iemitsu ferme le Japon au monde occidental. Il faudra attendre plus de 200 ans avant que la nation n'ouvre à nouveau ses portes.
La politique d'isolation du Japon
En 1690, le Japon est une nation complètement isolée du monde des occidentaux, et une période d'épanouissement culturel et de poursuite intellectuelle s'ensuit. Le Shogun Tsunayoshi présente ses lois de compassion protégeant les pauvres et prévenant les abus sur les animaux. Au XVIIIe siècle, la préfecture d’Edo est devenue la plus grande ville japonaise. Et aussi l'une des villes les plus vivantes du monde, attirant samouraïs, geishas, geikos, courtisans, marchands, écrivains et acteurs nippons. Les classes commencent à se mélanger, et la culture et le commerce s'épanouissent.
Cependant, des conflits couvent sous la surface de la société japonaise d'Edo. Alors que les seigneurs de guerre daimyo au pouvoir et leurs armées de samouraïs s'agitent, l'intérêt pour la science occidentale augmente, compliquant la politique d'isolement.
En 1853, le commodore Mathew C. Perry et son escadron de navires noirs entrent dans la baie d'Edo et exigent que le Japon négocie et fasse du commerce avec les États-Unis. Le Japon est dans une position précaire et le gouvernement est confronté au choix difficile de la guerre ou de la négociation. Se rendant compte qu'ils sont impuissants à repousser la puissance américaine, les Japonais négocient des traités avec l'Occident. Dix ans plus tard, la classe des samouraïs est dissoute et le shogunat Tokugawa prend fin. L'ère moderne du Japon a commencé faisant place à l’ère de l’empereur meiji !
Très bon commentaire merci pour tout ces renseignements sur les schogums Béatrice MASSEYS
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