Les japonais entretiennent une relation particulière avec la nature, cela se ressent dans leurs us et coutumes. En effet, ils s’adonnent à l'observation de la nature et de son évolution au fil des saisons en intégrant des festivités autour de ces événements ponctuels : on appelle cela le Hanami.
Du hanami des abricotiers japonais, couramment appelé Ume, au momijigari l’observation des feuilles rouges, autrement dit de l’automne, retour sur une coutume très ancrée dans la culture japonaise.
Qu’est ce que signifie le Hanami ?
Le hanami (花見) est une coutume japonaise historique qui signifie littéralement “regarder les fleurs”. Ce matsuri nippon est vieux de plusieurs siècles et elle consiste à observer les fleurs lors de leurs floraison. De nos jours lorsque l’on évoque le hanami on parle très souvent de celui des cerisiers appeler sakura en japonais.
La floraison des cerisiers a généralement lieu entre fin mars et début avril. Les nombreux parcs et jardins nippons sont le théâtre d’un somptueux spectacle à cette période de l’année.
Ce phénomène qui marque le début du printemps est très apprécié des jeunes qui viennent observer les fleurs qui passent d’une teinte blanchâtre à la couleur rose. Généralement sur l'archipel nippon on n’invite pas n’importe qui à aller observer les cerisiers en fleurs.
En effet, même si cet événement se fête entre amis, on y invite souvent l’élu de son cœur. Cette coutume à une grande symbolique dans cette société japonaise qui ne montre que très peu ses sentiments dans la sphère publique.
On peut donc déguster un bento (plateau repas déjà préparé, semblable à un pique nique) accompagné de son crush ou de ses amis les plus chers. Les adultes un peu plus âgés préfèrent l’ambiance et l’atmosphère du hanami des Ume (abricotiers), qui est généralement plus calme.
D'où vient la pratique du Hanami ?
Comme nous l’avons évoqué dans l'introduction, la pratique du hanami est vieille de plusieurs centaines d’années. Selon les historiens et spécialistes de l’archipel, cette pratique aurait débuté à l’époque Nara (710-784). A cette époque, le Japon est fortement influencé par son voisin chinois, que ce soit dans la culture, la religion, l'architecture et même dans l’art.
La célèbre dynastie Tang dirige l’empire du milieu et ont importé sur l’archipel nippon la coutume d’apprécier et d’observer la floraison des fleurs. La noblesse nippone s’est mise à pratiquer ce que les japonais appellent le kyokusui no utage, que l’on peut traduire par fête du ruisseau sinueux. Les nobles se mettaient aux bords d’un ruisseau et pratiquaient la poésie avec à la main une bonne coupe de saké.
Traditionnellement cette fête avait lieu le troisième jour du troisième mois du calendrier luni-solaire soit début avril sur le calendrier grégorien. A cette époque, c'est plutôt le hanami des ume qui est à l’honneur. L’heure de gloire des cerisiers viendra après lors de l'épque Heïan (794-1185). C’est en effet à partir de ce moment que les sakura ont commencé à attirer l’attention.
La floraison des sakura sonnait la saison de plantation du riz. Selon les croyances du shintoïsme, certains éléments de la nature comme les pierres et les arbres abritent des Kami. C’est pour cela que lors de la fête des ruisseaux à la floraison des sakura, les japonais faisaient des offrandes au pied des sakura.
Par la suite, toujours à l’époque Heian, sous le règne de l’empereur Saga, cette coutume s’est progressivement transformée en festivité. Appeler fêtes des contemplations, ces éclosions étaient accompagnées de mets raffinés avec comme boisson le traditionnel saké tant pour les convives que en offrande pour les kami. Cette coutume était à l’origine limitée à la haute société japonaise, comme à la cour impériale de Kyoto.
Par la suite, cette pratique s’est étendue dans la société des samouraïs. Sous l’époque Edo (vers 1600) ces coutumes se sont répandues aux gens du peuple. Être assis sous un sakura est une activité très appréciée des japonais et ce même de nos jours. Déguster un saké entouré de ses amis sous un cerisier en fleur fait partie intégrante de la culture japonaise.
Le Hanami et l’art
Le hanami à un place de choix dans l’art nippon. Cette pratique est très présente dans de nombreuses disciplines artistiques comme la peinture, la poésie et le théâtre. La poésie et le théâtre japonais sont intimement liés aux sakura et au hanami. L'éclosion de fleurs de cerisier est un symbole très fort dans la culture japonaise.
Pour commencer cette période de l’année symbolise le renouveau et est associée à la naissance. Outre cette image symbolisant la naissance et le retour à la vie, le hanami est l'équivalent du Carpe Diem dans la littérature occidentale. Eh oui, les fleurs des cerisiers, ces belles et jeunes fleurs symbolisent le côté éphémère de la beauté. La beauté n’est pas éternelle et les sakura en sont le parfait exemple.
D’un autre côté, le hanami à une place très importante dans la littérature asiatique et dans la poésie japonaise. En effet, ce moment était propice à la création et au partage de ces poèmes souvent chantés. À cette époque, les poètes et poétesses comme Ono no Komachi ou Basho Matsuo pratiquent le Tanka (短歌) et le Haiku (俳句). Ces formes de poésie lie le mot fleur au mot sakura et à la pratique du hanami. Ils associent ce mot à un moment de détente, de partage et d’allégresse. Cette association de mots met en évidence l’évanescence de certaines choses comme la beauté, le temps ou encore les sentiments.
Cela souligne l’importance de cet événement dans la culture et les coutumes de l’archipel. On retrouve également le hanami et la figuration des fleurs de cerisier dans l'ukiyo-e (浮世絵) et plus particulièrement dans les peintures dite de saison. Ces peintures mettent souvent en scène la floraison des sakuras. Elles mettent également en scène des actions de la vie quotidienne ou des paysages célèbres au japon.
Dans ces représentations artistiques le cerisier y est fréquemment représenté. Une nouvelle fois l’éclosion des cerisiers est utilisée afin de mettre en lumière le caractère éphémère de la beauté et l'évanescence de la vie.
Ou observer le Hanami au Japon ?
L’association des cerisiers du Japon appelée en japonais Nihon sakura no kai, à établie à la fin du 20ème siècles une liste qui répertorie les plus beaux sites japonais où l’on peut observer le Hanami. Dans cette liste on retrouve près de cent lieux très réputés sur l’archipel pour la beauté des sakuras en fleurs.
Les plus beaux sites ne sont pas nécessairement dans les mégalopoles nippones. En effet, on retrouve plusieurs de ces endroits au quatre coins de l’archipel. Cela montre à quel point cette coutume est une fête sociale qui fédère les japonais autour d’un même événement. Dans cette liste nous retrouvons des sites sur les quatres grandes îles japonaises à savoir : Hokkaido, Honshu, Shikoku et Kyushu.
Pour l’île d’Hokkaido située au nord du pays, un des endroits préconisé par cette liste lors de l’éclosion des fleurs de cerisier est le château de Matsumae : sur la route de Nijukken il y a un alignement exceptionnel de plusieurs centaines de Sakuras.
Pour l’île d’Honshu l’un des endroits le plus célèbre est le parc Hirosaki, appelé Hirosaki-kōen en japonais. C’est un immense parc de plus de 50 hectares où trône le donjon d’un château vieux de 200 ans. Les douves permettent de faire du pédalo tout en observant les quelque 2500 sakuras du parc.
Sur l’île de Shikoku ce sont plusieurs parcs qui sont à l’honneur. En effet, il y a pas moins de 5 parcs sur situé dans cette région du pays du soleil levant. On y retrouve le parc de Kotohiki situé à Kannonji, le parc de Kagami No situé à Kami, le parc de Makino situé à Sakawa et le parc de Seibu situé dans la ville de Tokushima.
Concernant l'île de Kyushu, l'île la plus au sud-ouest du pays, on retrouve également de nombreux endroits idéaux pour vivre le Hanami. Comme pour l’île de Shikoku on retrouve de nombreux parcs, mais pas que ! Il y a également un célèbre château fortifié appelé Kumamoto shiro que l’on peut traduire par château de Kumamoto. Pour finir à Mizukami on peut observer les cerisiers japonais aux bords du barrage de Ichifusa ce qui donne lieu à un panorama sensationnel.
Quand fleurissent les cerisiers japonais ?
Comme nous l’avons évoqué plus haut dans l’article, la période du hanami à lieu entre fin mars et début avril. Mais l’archipel étant relativement vaste, les dates peuvent varier en fonction de la position géographique dans le pays.
En effet, à l'extrême sud du pays, la floraison des sakura débute dès la fin du mois de janvier. On peut admirer des sakuras à cette période dans la préfecture d’Okinawa. A l’inverse au nord du pays, sur les îles de Honshu et de Hokkaido la période de floraison se clôture à la fin du mois de mai.
Pour être avertis en temps et en heure de cette dite éclosion, les japonais disposent d’un outil unique en son genre. Ils suivent la météo florale afin de connaître la “pleine floraison” et ce peu importe le lieu où l’on se trouve. Appelé sakura zensen, cet outil est en somme le bulletin météo de la fleur de cerisier. Assez fou n’est ce pas ?
Après la floraison il y a ce que les japonais appellent le Mankai c'est-à-dire la pleine floraison. Ce moment est un événement majeur dans l’année pour les japonais car il symbolise l’apogée, le summum, le point culminant de toute beauté !
Pour aller encore plus loin dans votre compréhension de la fleur de sakura à travers le temps, nous vous invitons à lire cet article de blog sur l'art floral japonais lié à la sakura...
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